Auto-censure, démonétisation, suppression de chaînes, pressions des annonceurs sur les règles éditoriales, passage au modèle d’abonnement, d’année en année, les règles de YouTube se sont durcies, même si le géant du streaming reste le site web le plus vu au monde. Or, l’illusion d’indépendance peut coûter cher quand la dépendance économique à la plateforme est au rendez-vous chez ceux même qui pensent pouvoir s’exprimer en toute liberté.

Renforcement de la censure sur YouTube

Depuis janvier, YouTube a renforcé ses règles de modération, entraînant la démonétisation des vidéos contenant de « gros mots », des insultes et des grossièretés. Les youtubeurs doivent maintenant revoir et censurer leur contenu existant en conformité avec ces nouvelles directives. Certains créateurs, tels que Terracid, ont publiquement exprimé leur mécontentement face à la sévérité et la rétroactivité de ces règles.

De plus, la plateforme semble démonétiser des termes qui ne sont pas explicitement vulgaires, comme l’a indiqué le youtubeur Aypierre. Cette politique plus stricte suscite des controverses parmi les créateurs de contenu, qui s’efforcent d’adapter leur langage aux nouvelles directives.

Entre des directives ambiguës et une politique éditoriale conservatrice

Pour un nombre croissant d’utilisateurs de la plateforme, la politique de YouTube sur ce qui constitue un « langage inapproprié » reste ambiguë, ce qui rend la conformité difficile pour les créateurs de contenu. Tandis que certains mots vulgaires sont explicitement interdits, d’autres, souvent tolérés à la télévision, ne semblent pas être visés par cette politique. Il y a également une restriction sur l’usage de certains mots uniquement après les premières quinze secondes d’une vidéo.

Ces règles reflètent les normes culturelles américaines, qui sont souvent plus puritaines que celles d’autres pays. Cette divergence culturelle, ainsi que l’ambiguïté des directives, suscitent des frustrations et des inquiétudes parmi les youtubeurs, qui se débattent pour s’y conformer.

L’effet rétroactif et le cas des mots neutres

La politique plus stricte de YouTube, en matière de langage, s’applique non seulement aux nouvelles vidéos, mais également à celles déjà publiées. De plus, elle ne se limite pas à la censure des injures ou des termes vulgaires. Des mots considérés comme neutres ont également conduit à la démonétisation de vidéos.

Par exemple, le youtubeur Aypierre a mentionné que l’utilisation des termes « ricain » et « bled » avait entraîné la démonétisation de ses contenus. Par ailleurs, une vidéo abordant le suicide de Kurt Cobain a été supprimée. La censure semble frappée de plus en plus et les contenus politiques comme sanitaires ne sont plus à l’abri dès lors qu’ils sortent des sentiers battus.

Une décision économique controversée

Aujourd’hui, YouTube justifie sa politique de modération renforcée comme une tentative d’améliorer l’optimisation monétaire du contenu sur sa plateforme. Cependant, cette décision est largement perçue comme un moyen de rendre l’environnement de YouTube plus attrayant pour les annonceurs en le nettoyant de langage offensant. En réalité, c’est presque un mouvement naturel de tout média que les plus gros annonceurs finissent par imposer leurs lois et influer sur le contenu. Dans le même esprit, on voit la publicité augmenter en volume et investir des plus en plus les vidéos au point d’en devenir désagréables.

Le pire reste que cette politique est critiquée pour son manque d’efficacité dans la modération des contenus haineux et de désinformation qui échappent souvent au contrôle et génèrent des revenus publicitaires. Malgré les efforts déclarés de YouTube pour améliorer son outil de modération et réduire la démonétisation systématique, les youtubeurs restent préoccupés par la sévérité des nouvelles règles et leur impact sur la liberté d’expression.

Le géant américain ploiera-t-il idéologiquement sous la pression de ceux qui rendent viables son modèle économique, au point de ne plus satisfaire ni ces derniers, ni ceux qui produisent son contenu ? C’est un risque auquel le géant du streaming devra faire de plus en plus face dans les années à venir. Et comme la nature a horreur du vide, il est fort à parier que certains contenus démonétisés finiront par migrer sur des solutions alternatives comme Twitch moins regardantes sur leur politique éditoriale.

Les youtubeurs politisés sont-ils vraiment indépendants ?
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